Cette fin d’année nous amène un beau cadeau de Noël dans le cadre de notre série d’interviews de BIM Managers. En effet, cette semaine, nous recevons l’un des grands du BIM en France, reconnu dans le monde entier par ses pairs et qui a une carrière des plus passionnantes, Nawar Zreik, Architecte de formation et Expert BIM. Il a traversé ces dernières décennies et a vu de nombreuses technologies évoluer, s’épanouir et aussi disparaître. Mais c’est aussi et surtout un architecte passionné et qui transmet son savoir aux futures générations. Passons quelques instants avec lui afin de découvrir son parcours qui l’a mené tout récemment au sein de Walt Disney Imagineering Paris.
Bonjour Nawar et ravi de te recevoir sur ABCD Blog. C’est un honneur et un vrai plaisir. Pourrais-tu tout d’abord te présenter en quelques mots à nos lectrices et lecteurs ?
Bonjour Emmanuel et merci pour cet honneur que tu m’accordes, c’est un privilège de côtoyer les grands noms du BIM qui sont passés par là.
Je suis BIM Manager chez Walt Disney Imagineering Paris, ainsi qu’enseignant à l’école d’Architecture, de la Ville et des Territoires.
Tu es architecte de formation. Peux-tu nous parler de ce parcours et ces études ? L’architecture a-t-elle toujours été une vocation et une passion pour toi depuis ton plus jeune âge ?
Pour être honnête, j’ai plus choisi l’Architecture par élimination. La passion est née avec la lecture de mon premier livre d’architecture : « Space, Forme and Order » de Francis D.K. Ching. Deux choses m’avaient alors frappé : l’expression graphique qui y était utilisée « croquis à main levée » et quelques œuvres majeures qui ont révolutionné l’architecture moderne, ce fut littéralement le coup de foudre.
Où as-tu fait tes études ? Comment la passion pour ce que nous appelions « l’informatique » t’est-elle venue ? Etait-ce d’ailleurs une passion ?
J’ai commencé mes études d’architecture en 1984, et sans faire référence à Orwell, c’était l’année du Macintosh. Pour moi, la 2ème passion est alors née, et j’ai cherché par la suite à combiner les deux et j’ai trouvé le lieu idéal pour cela : l’Ecole Spéciale d’Architecture qui s’était dotée d’un Laboratoire Informatique digne de ce nom « L.I.E.S.A » dont je faisais partie de ses premiers assistants, avec le regretté Francois Potonet, c’est là véritablement que les deux passions ont fusionné.
Le mot laboratoire y prenait tout son sens, avec la complicité d’un club qui regroupait les passionnés d’architecture et d’informatique avec un nom évocateur « Club Informatique et Architecture ».
Mon premier contact avec la 3D fut avec un logiciel qui s’appelait Vu-3D si ma mémoire est bonne sur un ZX Spectrum 128. Si vous savez ce que c’est, alors bienvenu parmi les dinosaures.
L.I.E.S.A, faisait partie de l’Apple University Group, ce qui nous donnait accès au savoir-faire développé sur MacOS avec une orientation très graphique « Architecture, PAO et Hypermédia », avec un intérêt particulier pour la partie DAO/CAO, aussi bien sur Mac que sur PC. Ccertains n’ont pas survécu, mais la liste des produits était longue, Architrion, AutoCAD et Arc+ ou encore 3d Turbo+.
C’était une période riche en découvertes et en recherches, avec une empreinte métier très prononcée, je pense que c’est de là que vient mon attachement aux projets plutôt qu’aux outils.
Quand ton voyage numérique a-t-il commencé ? Etait-ce avec l’ADIG ? Pourrais-tu nous en dire quelques mots ?
Mes premiers pas dans les maquettes numériques furent à l’école avec Architrion, mon premier stage chez Dumez avec l’équipe R&D pour le développement d’une routine de calcul d’escalier sur AutoCAD en Lisp, mais j’ai dû prêter main forte sur une charrette de production de dossier de permis. Cette expérience m’a ouvert les portes des agences d’architecture malgré mon jeune âge et le manque cruel d’expérience… dans une période de crise aigüe au début des années 90.
La vie est faite de rencontres, l’un de mes premiers était à l’agence d’architecture Alexandre Ghiulamila, ou j’étais confronté au sujet de l’interopérabilité… déjà, trois logiciels cohabitaient au sein de l’agence. Cette période était très riche parce que j’ai pu expérimenter ce qui était de l’ordre des concepts à l’époque, l’espace papier, les XREF… j’ai même tenté de simuler la notion du projet à travers des montages de Xref pour produire des plans de vente.
Roland Levy, Président de l’ADIG et ami m’a invité en me donnant carte blanche pour animer un stage pour les professionnels en soirée pendant les fêtes de fin d’année, en décembre 1993. Les retours semblaient positifs et c’est ainsi que j’ai pris gout au métier de « transmetteur »… L’aventure ADIG et par la suite ACTH avait commencé.
La richesse de l’expérience ADIG vient du fait que nous avons accompagné l’évolution de la technologie, un démarrage timide de la 3D sur AutoCAD pour s’intéresser de plus près à l’image avec 3D Studio, l’arrivée de 3D Studio Max et d’Autodesk Viz par la suite, ainsi que la révolution de SketchUp, tout en développant les autres aspects du métier autour de la communication avec le HTML, le multimédia et la gestion de projet….
Pour revenir au BIM ou plutôt pré BIM, avec l’ami Sylvain Wietrzniak, qui s’en est fait une spécialité, nous nous sommes lancés corps et âme dans l’aventure AutoCAD Architecture qu’on appelait aussi ADT à l’époque. Nous avons ainsi tenté de faire du BIM avant l’heure…
Mais nos routes se sont séparées avec l’arrivée d’Autodesk Revit sur le marché et nous avons continué chacun de notre côté.
Selon toi, qu’est-ce que le numérique et la 3D, avant que le BIM n’existe, ont apporté à nos métiers ? As-tu tout de suite eu cette vision d’un accélérateur et facilitateur de projets ?
Je n’ai jamais pu dissocier la conception de l’expression tridimensionnelle. Quand AutoCAD avait intégré l’AME, j’étais admiratif, cela représentait un intérêt majeur pour la phase de conception et un premier contact avec la notion d’objet. Sa gourmandise en ressources et le besoin d’une organisation sans faille ont fait que c’était plus un outil de modélisation à posteriori. Google SketchUp à l’époque a tout simplement révolutionné la modélisation 3D avec une approche de simplicité. Une expression graphique épurée, une interface limpide, l’outil était à la portée des concepteurs.
Tu as un parcours d’une richesse incroyable. Pourrais-tu en quelques mots nous parler de ton parcours professionnel et nous dire les faits marquants qui t’ont fait progresser, changer, etc. ? Et qui ont influencé ta vision des choses ?
Sans fausse modestie, je pense que je n’y étais pas pour grand chose, je me suis retrouvé au bon endroit au bon moment. Etant en mode apprentissage permanent, cela m’a permis de m’adapter au changement.
J’aime à croire que le fait d’être à la fois actif en production et dans le domaine de l’enseignement, m’aide à me maintenir en forme et m’a définitivement ouvert l’esprit… La remise en question permanente est la clé de survie dans ces milieux…
L’avantage quand on est jeune avec peu d’expérience et beaucoup d’inconscience c’est d’oser affronter des défis sans en avoir peur. Je me suis vu promu Chef de Projet sur un grand projet de logements à Paris, le passage de Junior à Senior fut un peu brut mais très formateur. Sur la partie Architecture certes, mais aussi la gestion de l’équipe et l’intégration d’un outil de production, qu’on regardait avec méfiance à l’époque, une situation un peu analogue avec le BIM aujourd’hui.
La 2D comme expression : Autres lieux autres mœurs, j’ai dû changer d’agence à un moment et l’expérience de CAD-Manager m’est tombée dessus par défaut, la personne qui en était en charge a démissionné et je dus me débrouiller pour la remplacer en 1995.
La 3D pour l’image : Les années 2000 c’était plus la gestion de la production et la communication, l’image de synthèse mais toujours dans un contexte architecture. J’ai dû accompagner des équipes qui travaillaient sur des concours d’aires de services en France et Europe et on a eu la chance d’avoir un maitre d’ouvrage qui avait compris que l’architecture ne devait pas être le parent pauvre dans ce contexte. On a tenté d’apporter un souffle nouveau dans ces projets.
La Maquette Numérique : Le fait de travailler sur des implantations de restaurants de type « restauration rapide » m’a permis de me concentrer sur l’optimisation de la production et la création d’un workflow Revit / 3ds Max. On ne peut pas vraiment parler de BIM à ce stade, mais plus de maquette numérique, c’était le point de bascule.
Pendant un certain temps, j’ai quitté le monde de la production pour me consacrer à la gestion et l’administration des projets, dans le cadre d’une agence Parisienne, avec une équipe composée d’anciens de l’école. Il s’agissait de projets de grande envergure, incluant planification urbaine, opérations d’extension de villes, et projets de logements. Le challenge était de consacrer autant d’effort sur le concept, la communication et la mise en œuvre.
On a tenté d’optimiser les moyens de production pour les coûts et surtout les délais, d’où une expérimentation un peu timide des données non graphiques et premières extractions et présentation des nomenclatures.
Architecte : Agence Fourcade
Projet : Péronnes-lez-Antoing en Belgique « Non réalisé à ce jour »
A ce stade encore, je n’osais pas parler de BIM. Au début des années 2010, j’ai décidé de m’y intéresser. Une rencontre avec un ami, Jean-Paul Tréhen et un certain Emmanuel m’ont permis de comprendre un peu mieux de quoi il s’agissait, du moins le pensais-je.
Le BIM : Je suis arrivé dans le BIM Management par le biais des documents BIM, en établissant des chartes et des protocoles avant même de les cerner pour de vrai comme si l’essentiel du BIM était dans l’aspect contractuel. C’était la porte d’entrée la moins facile , ça doit être mon mon profil archi qui m’oblige à avoir un regard global sur le sujet et non pas à m’arrêter à un aspect.
La réconciliation avec le BIM Management comme métier eu lieu chez Foundation, l’équipe était exceptionnelle avec une vision très « Archi » mais pas que, une ouverture d’esprit et des projets plus qu’intéressants.
L’occasion s’est présentée pour rejoindre un grand partenaire commercial et revendeur d’Autodesk, et j’ai fait un passage éclair dans le réseau, pour confirmer justement que ma place était auprès des équipes de production.
Depuis, j’ai rejoint la DREAM TEAM pour travailler sur des projets de rêve et j’ai retrouvé le plaisir de produire.
Tu as, pendant toutes ces années, enseigné en formation continue et même initiale. En quoi est-ce important pour toi ?
C’est un plaisir inégalable de « Transmettre », j’insiste sur ce terme, car pour moi la formation ou l’enseignement est la transmission du savoir-faire, le courant passe dans les deux sens, j’apprends autant que les étudiants à chaque fois.
Une remise en question à chaque fois, comme un sportif qui remet son titre en jeu.
La production est formatrice, mais on s’enferme un peu dans notre monde, cet intermède me permet d’oxygéner mon cerveau, d’avoir un regard neuf même sur ma vie professionnelle.
Hélas, le corps enseignant porte un regard sur les outils de production d’aujourd’hui, plus que sur l’intégration de ces outils dans la formation initiale. On réduit la réflexion à un produit commercial ou une société de consommation, ce qui est fort dommage.
Je pense qu’il est largement temps de reconsidérer l’outil et préparer les générations futures à les utiliser dans le cadre des projets, même à l’école.
Le monde de la 3D, du BIM, du numérique, est un petit monde avec ses aspects positifs et pas uniquement. Qu’en penses-tu et qu’aimes-tu dans tout cela ?
En effet c’est un petit monde, je ne sais pas si j’en fais partie pour de vrai. J’ai la position confortable d’un observateur, je profite tellement de sa diversité, de ceux qui sont dans la production et qui partagent leurs expériences, et d’autres qui ont un rôle plus dans le développement et la théorisation sur le BIM. Tous tentent d’apporter leurs savoir-faire. Je suis resté en dehors du cercle des influenceurs qui se risquent à chaque fois, même si par moment, je me heurte à des réactions violentes.
Il y a une compétition extrême entre les personnes et une remise en question permanente. Quel est ton secret pour toujours être à la pointe ?
C’est gentil à toi de le penser. S’il y a un fond de vérité dans ce compliment, je le dois aux autres : mes co-équipiers, mes étudiants, ainsi qu’au fait que je dorme peu, ce qui me laisse du temps pour me former. Avec l’âge, on a besoin de plus de temps pour apprendre.
Quels sont les projets marquants et/ou iconiques sur lesquels tu as travaillé et où le BIM a démontré toute son importance ?
Avec l’équipe Foundation, devenue la foncière numérique aujourd’hui, j’ai eu la chance de travailler sur de beaux projets, dont deux en particulier m’avaient marqué, le Curve avec la BNP Paribas conçu par l’Agence Chartier-Dalix, avec des particularités très intéressantes : Architectes sur un logiciel BIM autre que Revit, BET fluides sur Revit, BET Structure avec Revit /CADworks ; une structure bois avec un noyau béton et une ossature métallique en partie, la démarche développement durable, confort acoustique… c’était vraiment un beau projet et la démarche BIM pour la partie pré-synthèse et synthèse était très pertinente.
MOA : BNP Paribas Real Estate
BIM Management Foundation
Maitrise d’ouvrage BNP Paribas Immobilier
Superficie 24,400 m²
Equipe RF Studio (design d’intérieur), Bollinger & Grohmann (façades), Berim (fluides), Alto Engineering (AMO environnemental), Dal (économiste), D’ici là (paysagiste en phase conception),Franges Paysages (paysagiste en phase chantier), Terrell (structure), Capri (acoustique), SOCOTEC (bureau de contrôle), SSI Consulting (coordination ssi), Bureau Veritas (coordination sps), AH Conseil-Ascaudit (ascenseurs), CERES (restauration), Claude Fort Ingénierie (AMO vrd), Foundation Space & Vision (BIM manager)
Un autre projet, le centre commercial « Les Trois Pays » de l’agence Hérault Arnold Architecture, un autre beau projet dont la modélisation a été faite sur Rhinoceros 3d et j’ai eu la chance de partager un bout de chemin avec l’ami Danny Bodin, un excellent expert en la matière, pour reconstruire les surfaces avec des modèles génériques paramétriques dans Revit pour la construction.
Maîtrise d’ouvrage : Unibail-Rodamco
Maîtrise d’ouvrage déléguée : SCI 3 borders – Espace Expansion
Surface 113 000 m²
Maîtrise d’œuvre : Hérault Arnod Architectures, mandataires Matthieu Ballarin et Paola Figueroa , chefs de projet Thales, architectes d’exécution et BE économie : Agence Laverne, paysagistes CTE, structure Elithis, fluides et environnement Berest, VRD Lasa, acoustique Ingérop conseil et ingénierie, sécurité incendie
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Tu es désormais BIM Manager chez Walt Disney Imagineering Paris. Quel est ton quotidien et quelles sont tes missions ?
Pour restituer : Walt Disney Imagineering (WDI) est l’équipe créative qui imagine, conçoit et construit tous les parcs à thèmes, hôtels, attractions et navires de croisière Disney à travers le monde, et qui est responsable du maintien de ces infrastructures aux standards de qualité Disney. Walt Disney Imagineering Paris ou « WDI Paris » est l’entité française de cette entreprise, actuellement partenaire de Disneyland Paris pour mener à bien le plus ambitieux programme d’extensions du Parc Walt Disney Studios depuis sa création en 2002.
Le BIM a pris ses vraies dimensions, pour moi, avec mon expérience Disney.
Le fait d’avoir une équipe pluridisciplinaire qui conçoit et réalise le projet y est pour beaucoup.
Mon rôle change en fonction des phases du projet, je suis tantôt préparateur pour le lancement des projets en collaboration avec nos référents métiers et les chefs des projets afin de mettre en place les fichiers de démarrage dans chaque discipline, un peu formateur pour présenter par la suite les processus à l’équipe.
Après le démarrage, j’assure la supervision et le respect du BEP « BIM EXECUTION PLAN », toujours dans un esprit bienveillant et constructif – mais en prenant en compte les points critiques soulevés par nos référents que je remercie.
J’apporte également un support technique aux équipes et assure la gestion de la plateforme Autodesk BIM 360, la préparation et l’animation des réunions de coordination avec les ingénieurs projet, ainsi que la mise en place des maquettes de synthèse à l’aide d’Autodesk Navisworks.
Je suis également en concertation permanente avec notre équipe BIM pour évaluer nos processus et les faire évoluer en fonction des retours. Enfin, je m’occupe de la veille technologique et de la formation des équipes.
Est-ce une consécration pour toi ?
Dans « Consécration » on pourra lire « achèvement » et je m’en sens loin encore. Il y a tant à apprendre, à expérimenter et à voir.
Quand je suis arrivé chez Disney, je ne réalisais pas comme d’habitude, mon ignorance m’avait permis de foncer sans me poser des questions. C’est une expérience unique, avec des gens extraordinaires pour développer des projets magiques. Le simple fait de se promener dans les Parcs à thèmes et d’observer l’émerveillement sur les visages est en soi une récompense.
Nous avons déjà eu la chance de présenter ce que l’on faisait lors de l’évènement Autodesk « Future of Making » pour expliquer qu’on fait de l’architecture et de la construction tout en gardant une dimension Spectacle dominante, ce qui rend la tâche encore plus noble,
Oui peut être as-tu raison, c’est une consécration…
Sur quels projets de rêve travailles-tu dans cette belle société qui fait rêver ? Est-ce plus difficile que dans une société classique faisant de l’AMO ou une agence ?
Comme je le disais, nous travaillons sur l’ambitieux programme d’extension du Parc Walt Disney Studios, avec la création de nouveaux univers à thèmes mettant à l’honneur les franchises populaires que nous connaissons tous : attractions, restaurants, boutiques, etc.
Dans un contexte de verticalité « traditionnel », architecte BET ou tout autre acteur sur le projet défend chacun sa structure et s’occupe de sa mission avant tout. Même si tous œuvrent pour un projet, les alliances sont temporaires et circonstancielles.
A l’inverse, chez Disney, tous les corps de métiers et acteurs du projet travaillent en synergie dans un seul objectif, créer des expériences immersives uniques pour les visiteurs et leur faire vivre des moments inoubliables. Plus facile, je ne sais pas, mais certainement plus riche, plus constructif et plus efficace.
Quels outils utilises-tu au quotidien ? Modélises-tu aussi ou te consacres-tu uniquement au BIM management et à la gestion d’une équipe ?
Nos outils sont : Autodesk Revit pour le BIM, Civil 3D et AutoCAD pour l’infrastructure, Navisworks pour la coordination et BIM 360 pour la collaboration. J’interviens principalement en support des équipes.
Dans un tel environnement de convergence entre projets bâtiments et machineries, la convergence doit être primordiale. L’interopérabilité joue-t-elle un rôle central et incontournable ?
Avec autant d’acteurs sur les projets et tant de spécialités, c’est une évidence. Nous pourrions distinguer deux phases :
- en phase études, les échanges se font à l’aide d’un format propre à Disney qui a été développé par nos équipes aux USA et qui permet des mises à jour dans les deux sens, peu importe le logiciel de production ou d’accueil.
- pour l’exécution, les fabricants travaillent sur leurs propres chaines de production et on accueille leurs travaux dans Revit pour les rendre accessibles à tous. Donc une partie de mes missions est consacrée à la réception/conversion et intégration des fichiers.
Tu travailles dans une entreprise appartenant à un groupe américain. Penses-tu que la culture anglo-saxonne soit plus prompte pour ces virages méthodologiques et ces transformations de notre industrie de l’AEC ?
Ce qui est sûr, c’est que le mariage des deux systèmes, français et américain, marche parfaitement. On a su garder le dynamisme américain et la culture française.
La combinaison des deux cultures est si subtile qu’il est difficile de tracer l’origine de tel ou tel élément, mais une rigueur visible dans la production est remarquable. Je rends hommage à l’équipe qui est à l’origine de la création et la préparation de tous ces outils mis à disposition des équipes de production.
Tu as souvent des prises de position intéressantes et extrêmement rationnelles et pragmatiques sur les réseaux sociaux, sur le métier de BIM Manager et toutes ses appellations. Tu n’aimes pas qu’on mette les gens dans des boîtes. Pourrais-tu nous exposer ta vision sur ces métiers du BIM et comment tu les vois évoluer d’ici quelques années ?
Pendant un temps, je ne savais pas comment décrire de façon pertinente le rôle de « BIM Manager ». Mon discours était « c’est à l’architecte de prendre en charge ces tâches », mais l’exercice du métier m’a fait changer d’avis…Et à mesure que je commençais à comprendre mon rôle, j’ai souhaité intégrer à cette description mon point de vue depuis le terrain.
Un BIM Manager est avant tout un facilitateur, celui qui cherche les meilleurs compromis entre différents discours qui cohabitent au sein du projet. Neutre et objectif, il n’a qu’un seul objectif : « LE PROJET ».
Un regard horizontal et bienveillant, à l’ère des jumeaux numériques, je dirais qu’on est les gardiens qui s’assurent que tout fonctionne dans votre bâtiment et font régner la bonne humeur pour rapprocher les voisins.
Penses-tu que les études d’architecture et d’ingénierie préparent suffisamment à ces changements de paradigmes de nos professions, notamment en France ?
Il y a encore une marge d’amélioration considérable sur ce point. Nous sommes encore en train de former des étudiants à la CAO/DAO, or je trouve cela bien dommage de réduire la démarche de conception à des dessins. Il est temps de remettre le PROJET au centre du développement et de mettre la technologie au service du projet. On a mis vingt ans à adopter les outils de dessin, faut-il en attendre autant pour passer à la maquette numérique et au BIM ? J’ose espérer que NON.
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Que penses-tu justement des actions menées pour la transition numérique et le BIM en France ?
A vrai dire, je n’ai jamais pris part dans les actions de du plan de transition numérique dans le bâtiment, d’ADN Construction ou encore de Mediaconstruct, alors ce serait déplacé de ma part de juger leurs actions.
Le constat est que depuis presque dix ans nous en sommes presque au même stade du point de vue de la législation et cela porte un préjudice à la démarche individuelle des maitrises d’ouvrage vers le BIM, publiques ou privées.
Quelles sont tes passions hors BIM et numérique ?
Je tente de développer un peu mes compétences en photographie et en écriture, je n’ose pas parler de dessin quand je vois les tiens.
Connaissais-tu ABCD blog ?
Non c’est quoi déjà ?
Tu plaisantes j’espère, c’est un grand honneur d’y figurer.
Y-a-t-il quelque chose de particulier que tu souhaiterais dire à nos lectrices et lecteurs ?
Juste se faire plaisir en faisant notre métier, l’un des plus beaux.
Cher Nawar, un grand merci pour ce récit de ton parcours passionnant. Nous te souhaitons de continuer encore à nous émerveiller toutes ces prochaines années et de continuer ta brillante carrière.