Parmi les sujets clés du moment, il en est un qui revient de manière continue, celui des jumeaux numériques, ou digital twins en langage anglo-saxon. Cette nouvelle approche permet de mieux gérer et maintenir ses assets et d’effectuer des économies substantielles sur la partie OPEX. Parmi les grands acteurs leaders en la matière, Capgemini fort de nombreuses années d’expérience sur le sujet, ouvre de nouvelles voies et nous livre sa vision.
Nous avons ainsi l’honneur et le plaisir de recevoir cette semaine l’un des grands noms français Leader du conseil des services informatiques et de la transformation digitale, Capgemini. Ils s’impliquent depuis plusieurs années sur les sujets du BIM et collaborent de manière très étroite avec la Société Autodesk. Mickaël GUILLEUX-NEDELLEC est à la tête des Solutions BIM au sein de cette grande entreprise et il va nous expliquer les orientations et implications stratégiques de Capgemini sur ces sujets impactants.
Mickaël GUILLEUX-NEDELLEC
Head of BIM Solution | Practice CSD
Bonjour Mickaël, pourrais-tu stp te présenter en quelques mots et nous parler de ton parcours professionnel avant d’avoir intégré Capgemini ?
Bonjour Emmanuel. La ligne directrice qui a orienté mon parcours scolaire et mes expériences professionnelles, c’est l’apport de l’informatique à la représentation du monde réel. De fait, je suis passé par la CAO-DAO et le SIG pour arriver il y a quelques années dans le BIM. Mes activités depuis plus de 20 ans m’ont amené à travailler dans les secteurs public et privé sur un large spectre métiers, que ce soit en BE, pour un éditeur ou désormais chez Capgemini, leader des intégrateurs.
Tu es un expert reconnu des sujets SIG. Était-il naturel et aisé pour toi de bifurquer vers les sujets tels que le BIM ?
Le Système d’Information Géographique est véritablement un terrain de jeu riche et très intéressant qui permet des analyses croisées de données en utilisant le support de la cartographie. Passer de l’extérieur à l’intérieur des bâtiments et des infrastructures est en soi un exercice simple mais rendu compliqué par les outils mis à disposition. Les silos existent aussi en informatique. Le rapprochement de grands éditeurs comme Esri et Autodesk et au-delà l’ouverture des systèmes informatiques à travers les APIs ont facilité ce passage.
Deux éléments l’ont permis :
1. Le BIM sous l’impulsion de l’état, des éditeurs et d’acteurs comme MediaConstruct ou MINnD est devenu un sujet pour les clients de Capgemini notamment autour de la maîtrise des données et d’un fort besoin de collaboration et d’interopérabilité.
2. La capacité d’un intégrateur comme Capgemini d’accompagner ses clients vers des sujets relativement nouveaux pour eux et à permettre à ses collaborateurs de monter sur le sujet. J’avoue qu’au début ce ne fut pas simple, la présence de Capgemini sur la première édition du BIM World pouvait apparaître surprenante mais nous avons su en très peu de temps présenter notre positionnement et sa valeur ajoutée sur les sujets BIM. Aujourd’hui Capgemini est reconnu comme un acteur du BIM intégré à l’écosystème et son partenariat avec Autodesk va dans ce sens.
Donc merci à nos clients et à Capgemini d’avoir permis à cette possibilité de devenir une réalité.
Quel est ton rôle et quelles sont tes missions chez Capgemini ?
Mon rôle premier chez Capgemini est Business Analyst autrement dit Consultant métier. Les premières missions que j’ai réalisé consistaient à aider mes clients à définir, mettre en œuvre et déployer des solutions SIG dans leur contexte SI. Par la suite, j’ai eu l’opportunité d’enrichir mon expérience avec des rôles de Chef et Directeur de projet tout en étendant le périmètre de mes activités au BIM et sujets liés comme l’Asset Management, la GED, la GMAO, l’IoT avec l’étiquette de Head of BIM, précurseur et expert reconnu du sujet chez Capgemini.
Aujourd’hui, je suis responsable des activités d’Assistance à MaÎtrise d’Ouvrage (AMOA) pour l’offre Smart Digital Twins (SDT) de l’entité Custom Software Development (CSD) de Capgemini France. Celle-ci regroupe tout ce qui est Smart Asset, BIM, Smart Building, Smart Cities et Smart Territories. Le Jumeau numérique dans l’ensemble de ses dimensions spatiales pour les usagers, les gestionnaires, les décideurs.
Capgemini, un grand nom du Conseil informatique français. Pourrais-tu nous présenter en quelques mots et chiffres le groupe et nous dire vos secteurs d’activité historiques ?
Grand est un euphémisme. A ce jour, c’est la plus grande entité dans laquelle il m’ait été donné de travailler. A fin 2019, le Groupe regroupait presque 220 000 personnes réparties dans le monde entier avec un chiffre d’affaire de plus de 15 Milliards d’euros en croissance. Une dynamique incroyable. Nos activités se concentrent sur les sujets cœur du groupe que sont la donnée et les services autour des applications IT, qui touche aujourd’hui de grands sujets d’innovation que sont le Cloud, l’IA, la 5G, l’environnement et bien sûr tout ce qui touche au Jumeau Numérique.
Pour ce qui est des verticaux métiers, Capgemini est présent partout avec comme grands secteurs les services, l’industrie, l’énergie et les utilities mais aussi les biens de consommation, le commerce, les services publics, les télécoms, la finance. Un environnement très vaste.
L’OPA amicale sur ALTRAN devrait également nous permettre de consolider et renforcer notre offre autour de notre expertise métier et des industries. 60 000 personnes de plus. C’est juste incroyable.
Capgemini de l’extérieur est vu comme une ESN, pour autant c’est une entreprise qui permet aux développeurs mais pas seulement d’évoluer.
Comment se situe le Département dont tu fais partie et comment êtes-vous organisés ?
Au sein de Capgemini, je suis dans l’entité Application Services et plus précisément au sein de la Practice CSD (Custom Software Development) soit l’entité qui imagine des solutions technologiques pour ses clients.
Cette entité regroupe environ 2600 personnes en France (Paris, Rennes, Nantes, Bordeaux, Bayonne, Toulouse) et environ 230 à l’étranger (Maroc, Espagne, Inde).
La practice CSD est au service des entités commerciales sectorielles comme par exemple EUC (Energy, Utilities & Chemicals), MALS (Manufacturing/Automotive, Aerospace & Life Science), Services, Public Sector, TMT (Telecom, Media & Technology), CPRD (Concumer Products, retail & Distribution).
Quelle typologie de Clients adressez-vous ?
2 typologies par défaut :
- Les métiers regroupant les opérationnels et les décideurs sur des sujets spécifiques qui peuvent être en lien avec les secteurs indiqués précédemment.
- Et les DSI, autrement dit les fonctions supports aux métiers pour la mise en œuvre de solutions technologiques adaptées au sein des SI existants.
On trouve aussi les Achats, partie prenante de tous les Appels d’Offres mais ce ne sont pas nos interlocuteurs premiers.
En général, pour qu’un projet se déroule bien il faut que ces différentes typologies aient été adressées.
Le BIM ! Quand avez-vous décidé de prendre cette orientation stratégique et quel type de solutions développez-vous pour vos clients ?
Avant mon arrivée chez Capgemini, une équipe travaillait dans le domaine de la gestion d’actifs (Asset management), en particulier dans le secteur de l’énergie.
En 2015, j’étais en AMOA pour un opérateur ferroviaire sur un projet Européen de transit des marchandises et responsable entre autres de la mise en œuvre de chaînes de traitement de données redondées (en mode SIL 4) pour collecter, maîtriser et mettre à disposition des industriels les infrastructures des lignes ferroviaires. Dans ce contexte où la connaissance de la donnée est cruciale, le Jumeau Numérique s’est imposé de lui-même. Cet opérateur avait déjà des actions en cours sur le BIM et c’est donc naturellement que nous avons lancé des expérimentations sur le sujet y compris avec le prisme de la gestion d’actifs.
Par la suite, plusieurs de nos clients nous ont sollicité pour aborder ce sujet et son intégration au sein de leur SI, ce qui nous a permis d’acquérir une expertise et une connaissance approfondie du BIM que ce soit au niveau technologique, démarche et écosystème. Ce fût également le début de la présence de Capgemini à BIM World et le début du rapprochement avec les grands acteurs dont certains éditeurs mondialement connus.
Pourquoi la phase de gestion et maintenance est-elle si importante selon toi et mérite-t-elle une attention aussi particulière ?
La conception et la construction sont des phases critiques et indispensables mais pas celles qui nécessitent le plus d’investissement et de temps.
Une fois le bâtiment ou l’infrastructure réalisée, elle est mise à disposition de ses occupants, des gestionnaires et des équipes de maintenance et ce pour une durée qui varie de quelques années à plusieurs dizaines d’années. Typiquement, quand on construit une gare c’est pour 100 ans. L’entretien de cette gare, les services proposés aux usagers vont coûter 75 à 80 % du cout total (life cycle cost) de ce patrimoine.
Ce temps et cet investissement font que cette phase est la plus importante et mérite une attention particulière.
Chez Capgemini nous avons observé que le gros de l’investissement informatique quand on écarte la GMAO ou les solutions de gestion patrimoniale était focalisés sur le BIM pendant la phase de construction. Après échanges avec nos clients et nos partenaires dont Autodesk, nous avons décidé de faire un focus sur cette phase de gestion et maintenance pour répondre à leur besoin.
En quoi le jumeau numérique peut-il aider les exploitants à mieux gérer leur patrimoine ?
Le jumeau numérique est la fédération de toute la connaissance d’un actif en un point unique (souvent appelé la source unique de vérité), mis à la disposition de l’ensemble des parties selon leur niveau d’accès, à travers des visualisations variées comme la 2D (schématique), la 3D ou la cartographie pour faciliter la mise en contexte.
Le cerveau perçoit notre environnement en 3D. Il nous est donc plus facile d’appréhender une situation en 3D que sur un dessin technique en 2D notamment quand plusieurs objets sont superposés. Disposer d’un Jumeau Numérique dans lequel chaque objet est à sa place et correspond au monde réel est un facilitateur pour les équipes de maintenance afin d’appréhender au mieux ce qu’il faut remplacer, comment réaliser la gestion et maintenance et comment l’environnement immédiat se prête à cette opération. Difficile d’appréhender sur un dessin 2D s’il vous faut un plan ou si vous aurez la place pour manipuler une pièce que vous devez remplacer.
Reflect IoD est-elle votre solution phare et à quels besoins répond-elle ?
Oui, mais pour autant Capgemini n’est pas éditeur, nous avons donc décidé de concevoir ce que nous appelons un « accélérateur », une solution prête à l’emploi et que nos clients peuvent étendre à leur guise en enrichissant son code de leurs besoins spécifiques. Cette solution devant permettre une grande ouverture, son architecture a été pensée pour répondre au plus grand nombre de besoins autour de la manipulation des maquettes numériques mais surtout pour la fédération de données multi-sources pour réaliser le référentiel de données BIM, y compris la liaison vers la GED, la GMA, le SIG et l’IoT. ReflectIoD est une solution native cloud, serverless, et scalable by design.
Autre point, cette solution a été conçue pour s’adresser en priorité aux opérationnels, ceux qui ont besoin de superviser leur patrimoine, d’accéder facilement à des données diverses mais complémentaires et de les consulter sans changer plusieurs fois d’interfaces.
De ce fait, c’est une solution que nous mettons en avant car elle se distingue des plateformes existantes par sa polyvalence fonctionnelle, technologique à destination d’un propriétaire, d’un gestionnaire d’actifs ou d’un mainteneur.
Notre but, en tant qu’intégrateur, n’est pas de vendre des licences mais de délivrer un service qui réponde aux besoins en s’appuyant sur un accélérateur qui a été pensé pour s’intégrer au SI.
Elle couvre aussi bien le bâtiment que les infrastructures et les SIG ?
Par son concept de fédération de données, Reflect IoD s’adresse à tous les types d’actifs que l’on est capable de représenter sous forme de jumeau numérique tout en les positionnant dans un environnement SIG ce qui permet facilement ensuite au sein de l’interface de visualiser les objets dans leur environnement, en contexte et facilite certaines analyses.
Quel type de données est-elle capable d’agréger ?
La solution Reflect IoD est capable d’agréger des données 1D, 2D, 3D, SIG, IoT dans différents formats. Vous pourrez ainsi superposer le nuage de points laser d’un bâtiment au format e57, sa maquette numérique en IFC ou RVT (Revit natif) et associer la sélection d’un objet sur le plan 2D en DWG, tout en accédant à la fiche technique au format PDF d’une vanne par exemple ou encore aux ordres d’intervention associés dans la GMAO.
Ces notions de fédération et d’hypervision ont été pensées pour être accessibles depuis une seule interface et nous travaillons régulièrement à améliorer l’expérience client. Nous faisons en ce moment le multifenêtrage et l’intégration d’un GeoServer.
Sa particularité est son développement sur Autodesk Forge en grande partie. Peux-tu stp nous en dire un peu plus ?
Dès le début des expérimentations, la question s’est posée de savoir si nous posions un principe de base au niveau du format : une plateforme openBIM ou éditeur donc liée à un format. Nous avons cherché une solution agnostique qui nous permette de nous affranchir des formats d’entrée sachant que la plateforme n’a pas vocation (aujourd’hui) à faire de la modification des maquettes elles-mêmes.
Parmi les options disponibles, les APIS de FORGE nous offraient cette souplesse, tout en répondant à notre priorité autour du Service. Notre analyse nous a montré qu’au-delà de développer une solution de type accélérateur pour nos clients, nous pourrions également apporter à Autodesk notre capacité de développement. Du coup nous avons fait les 2, intégrer les APIs Forge qui nous intéressaient et dans le même temps nous sommes devenus Forge System Integrator, avec une portée mondiale.
Cette possibilité de faire converger les données des capteurs et des maquettes BIM est-elle une force selon toi et pourquoi ?
La possibilité de faire converger les différentes sources d’information, de les fédérer et de les superposer pour faciliter les analyses est un facteur de gain important. De fait, pouvoir associer les capteurs directement dans le jumeau numérique à l’image d’un SCADA mais dans un environnement dynamique où le support et donc la maquette n’est pas statique est un vrai plus.
On donne la capacité à un exploitant de supervision d’un bâtiment ou à un process industriel, d’être notifié rapidement des anomalies, de pouvoir à travers la maquette accéder plus finement au problème, éventuellement d’associer l’accès aux caméras pour conforter son jugement et également d’intervenir directement si les objets connectés sont bidirectionnels, comme par exemple fermer une électrovanne en amont d’une fuite, ou encore une porte coupe-feu.
Dans notre monde connecté, à l’image de la domotique, c’est la rapidité et le choix judicieux de l’intervention qui optimisent les actions. La réduction des pertes de temps et les aides aux choix pour limiter les erreurs sont prépondérants.
Vos technologies couvrent-elles uniquement la phase d’exploitation et de maintenance ? Est-ce seulement les bâtiments de bureaux et industriels ou touchez-vous aussi d’autres types de programmes ?
Comme indiqué, nous avons fait le choix de nous focuser pour ce qui concerne Reflect IoD sur la phase exploitation – maintenance. Pour autant, nos technologies couvrent les phases amont, en particulier le suivi de la construction, en Greenfield (construction neuve) aussi bien qu‘en Brownfield (existant).
Nos technologies appuient un choix assumé de ne pas aller sur un périmètre restreint pour répondre à un besoin métier très particulier. Nous couvrons l’ensemble des objets qui peuvent être représentés par un jumeau numérique, que ce soit du bâtiment, de l’infrastructure ou du process industriel.
Cette façon de penser nous a amené à ne plus penser les activités en silos. C’est pourquoi en 2020, nous parlons de Smart Digital Twins et associons plusieurs offres initialement traitées par des équipes séparées.
Il est important de voir un objet comme utile pour une action, intégré à un système qui lui-même interagit avec d’autres systèmes donc unitairement et dans sa globalité.
Quels bénéfices attendus et chiffrés cela représente-t-il pour vos clients ?
Le premier bénéfice dont nous font part nos clients c’est le gain de temps ou inversement la réduction de la perte de temps à chercher de l’information. L’agrégation de données issues initialement de mondes différents, la capacité à disposer d’une supervision sans limite géographique, en indoor et en outdoor est un vrai changement.
Le second bénéfice porte sur les processus de travail, la nécessité de structurer l’information pour casser les ruptures numériques. L’exemple le plus présent étant la non-utilisation des maquettes numériques produites dans le cadre des DOE pour la phase d’exploitation, car elles n’ont pas été pensées pour. Le constructeur va être intéressé pour découper une dalle en fonction de son coulage, le FMeur, pour les espaces alloués sur cette même dalle en termes d’occupation.
En troisième, les gains de prédiction à 2 niveaux :
- Au niveau de la programmation avec des capacités accrues de Generative Design et d’analyse spatiale couplés notamment au SIG pour maximiser ces choix d’investissement, ce qui vaut bien évidemment également pour la phase de conception et l’optimisation des métrés, ce qui impacte les achats.
- Au niveau de l’exploitation, durant laquelle prévoir et anticiper les pannes permet un fonctionnement optimal et donc une production améliorée ainsi qu’un dérangement limité pour les usagers.
On peut trouver que c’est secondaire mais on touche directement à un sujet qui tient à cœur à Capgemini, celui de l’environnement. Limiter les pertes, c’est aussi limiter l’utilisation des ressources, le gaspillage ou la mise en décharge de matières. Au-delà du gain financier, c’est donc une exploitation plus mesurée des espaces, des matières premières que sont le bois, l’eau, le sable, etc.
Votre offre Reflect IoD comprend-elle aussi du service pour le déploiement ? Si oui avez-vous des équipes dédiées et quel est leur rôle ?
Comme vous l’avez compris, notre souhait est de faire du service et la façon dont nous mettons en avant reflect IoD va dans ce sens. Nous avons une équipe de développement dédiée avec un chef de projet et un Product Owner, des équipes de développements dédiées au client et une équipe d’AMOA à même d’aider le client à opérer une transformation digitale intégrée au sein de son SI.
L’agilité et la souplesse sont le maître mot. Les équipes de développements sont donc à même de faire du déploiement ce qui par ailleurs leur permet pour la suite d’appréhender des difficultés et donc de les remonter et de les corriger.
Nos équipes travaillent main dans la main et font régulièrement des sessions de travail en commun.
Cette proximité est appréciée par nos clients qui du coup se sentent mieux écoutées et plus en confiance.
Dernier point et non des moindres, Capgemini dispose de commerciaux dédiés à des verticaux métiers, au sein de SDT, nous avons des business developers en appui de ces équipes pour mieux appréhender et présenter les sujets relatifs au jumeau numérique.
Créez-vous vous-mêmes les maquettes pluridisciplinaires BIM ou sous-traitez vous cette partie ?
Les deux mon cher. Capgemini dispose d’une équipe de dessinateurs-projeteurs et de modeleurs BIM. Pour autant, il nous arrive notamment pour une question de proximité ou de réactivité de faire appel à certains de nos partenaires pour réaliser ces activités. Certains de nos AMOA sont aussi habitués à manipuler et à utiliser des outils de modélisation et il arrive qu’en plus de leur activité de conseil, nos clients leur demandent de réaliser des maquettes.
Autre point, il nous paraît important d’utiliser des modeleurs spécialisés, ayant l’habitude de certains objets particuliers livrés par des fournisseurs spécifiques. De la même façon qu’il faut utiliser le bon outil, il faut utiliser la bonne ressource et il nous est arrivé de refuser des missions car nous pensions ne pas être en mesure de réaliser un travail de qualité.
Où les jumeaux numériques sont-ils stockés ? Faites-vous du on premise ou utilisez-vous les plateformes des grands fournisseurs que sont Amazon, Microsoft et autres ?
Un choix stratégique a été opéré par Capgemini de ne pas faire de reflect IoD une plateforme OnPremise. Par défaut, nous sommes Cloud. La solution est certifiée sous AWS et Microsoft Azure sachant que d’autres fournisseurs notamment français sont dans le scope.
La question du référentiel de données que l’on peut aussi appeler CDE pour Common Data Environment, peut toutefois en termes d’architecture informatique être déployée dans les 2 environnements voire en hybride. Il faut différencier les fonctions gérées au sein de la plateforme et accessibles vie des services sur le Cloud, de l’accès aux données. C’est pourquoi, dès l’amont nous faisons intervenir un architecte d’entreprise afin de s’assurer que la solution proposée corresponde aux besoins, aux contraintes et soit possible.
Qui des projets confidentiels ? Peuvent-ils aussi bénéficier de jumeaux numériques ?
Les projets confidentiels sont en général très friands de ce qui peut sécuriser et/ou optimiser les prises de décision. A ce titre, le jumeau numérique, avatar intelligent de la réalité est clairement un plus demandé. La différence se situe dans les contraintes de sécurité apportés à différents niveaux de l’architecture, y compris au niveau des données elles-mêmes. Notre compétence d’intégrateur sur ce type de projet est vu comme un gage de sérieux.
Avez-vous une partie mobile à votre offre ?
Par défaut, oui dans le sens où Reflect IoD est une plateforme de type client serveur web. Dans ce contexte, une tablette avec un client Web classique peut utiliser la solution.
Au-delà, passé l’effet Wahoo, nous avons effectué des expérimentations autour des sujets de réalité virtuelle et de réalité augmentée sur différentes technologies y compris à base de moteurs de jeux comme Unity 3D.
Dans un cas comme dans l’autre, ce qui prévaut à l’utilisation du mobile pour nous reste lié au besoin premier du client. Du coup, notre offre s’adapte à celui-ci y compris s’il faut travailler sur des sujets asynchrones quand le réseau manque sur certains sites.
Vous collaborez avec Autodesk depuis longtemps maintenant. Peux-tu nous détailler cette collaboration ?
Je me souviens de l’époque où avec Maxime Suing (CSM chez Autodesk) nous avions commencé à évoquer cette possibilité lors d’un salon sur un coin de table, avant que les premiers échanges ne se concrétisent à plus haut niveau chez vous et chez nous.
En très peu de temps, on est passé de « ce serait intéressant » à des échanges entre nos équipes techniques respectives, de la visibilité croisée sur nos roadmaps et choix stratégiques, pour aboutir à des actions commerciales conjointes en France mais également ailleurs dans le monde comme aux USA, en Europe, et en Asie.
Il est très important d’indiquer que cette collaboration se fait aujourd’hui avec une grande transparence et une vraie volonté d’aller de l’avant qui se ressent déjà à travers les retours de nos clients.
Ce n’est que le début et nous sommes très heureux de cette synergie. Par ailleurs, ce partenariat est complémentaire d’autres, ce qui nous permet d’adresser certains clients sur un périmètre plus large de leur SI pour optimiser encore mieux les gains.
A ce stade, je ne peux citer nos clients mais certains seront présents sur notre stand pour s’exprimer lors du salon BIM World 2020.
Les solutions pour la gestion et la maintenance commencent à se multiplier. Quels sont les éléments qui vous différencient par rapport à vos concurrents ?
Ceci tient en 3 mots : intégrateur, agrégation, hypervision
- Intégrateur nous sommes et nous le mettons en avant comme un différenciateur. Par défaut nous sommes agnostiques, donc notre focus est que la solution proposée réponde au besoin tout en s’intégrant parfaitement dans le SI client pour être utilisé par les clients. A ce niveau, notre expérience en gestion de projet est également saluée et sollicitée par nos clients et partenaires.
- Agrégation car la priorité d’une plateforme collaborative, c’est sa capacité à rassembler des données très hétérogènes pour permettre une gestion optimisée de son patrimoine. Et dans ce domaine, nous ne sommes pas liés à un éditeur ou à un format.
- Hypervision au-delà de la gestion à proprement parler qui peut sur faire avec une vision tableur, nous amenons la représentation du jumeau numérique au cœur du dispositif pour aider à contextualiser la gestion, prenant ainsi en compte l’ensemble des apports des outils métiers du SI, le tout rassemblé sous une interface.
Pourrais-tu nous citer quelques cas de succès clients et les argumenter ? Des projets qui te tiennent à cœur ?
Comme indiqué précédemment, je ne peux citer nos clients. Voici cependant trois projets qui ont jalonné mon parcours.
Le premier est celui de l’opérateur ferroviaire, car ce fut pour moi le début de l’histoire vers le BIM, dans un contexte Européen, la maîtrise de la qualité et de la précision de la donnée était juste un challenge incroyable.
Le second est un client que j’accompagne depuis quelques années maintenant, un peu en dehors des sujets habituels et qui touche de près à l’environnement. Cette structure qui gère une dizaine de sites industriels m’a impressionné depuis le début de par sa volonté de se transformer, d’intégrer de nouvelles technologies, son implication à tous les niveaux et le souhait de viser la valeur ajoutée (un service public soucieux des deniers de l’état). Cette structure publique prend le temps de monter en compétence sur les sujets, de les intégrer dans ses processus et augmente son niveau d’échange avec ses prestataires d’année en année avec toujours ce souci du service efficace.
Le troisième est un acteur important du secteur parapétrolier. Ce serait plus à mon collègue Alban ALEV (responsable de l’offre SDT) d’en parler mais c’est l’un de nos premiers clients pour lequel nous faisons de l’intégration autour des APIs Forge. Nous avons dû relever de gros défis et l’équipe a franchement fait un très beau travail qui se solde par la confiance du client sur différents sujets.
L’interopérabilité joue-t-elle un rôle clé pour vous et en quoi la plateforme Forge vous aide de ce point de vue ?
On revient au cœur des plateformes collaboratives : les données. Comme indiqué précédemment, nous avons testé différentes opportunités qui s’offraient à nous et nous avons jugé que pour répondre au plus grand nombre il fallait de l’ouverture notamment en termes de formats d’entrée. Les APIs Forge dont Model Derivative nous ont permis de passer ce cap. Avec plus d’une soixantaine de formats acceptés (dont le standard openBIM IFC), elle offre un choix suffisant pour répondre à la grosse majorité des demandes. L’investissement d’Autodesk pour pérenniser Forge et en faire le socle de son offre Cloud et notamment de BIM 360 nous conforte également dans ce choix en termes de pérennité.
Quels sont vos objectifs stratégiques de développement pour le futur très proche et moyen terme ?
Devenir le partenaire principal d’Autodesk en tant que Forge System Integrator Monde, ce qui peut passer par un rapprochement entre Forge et BIM 360 au niveau des synergies. Notre équipe de développement a des objectifs ambitieux de croissance cette année.
Positionner notre savoir-faire notamment sur nos compétences Smart Digital Twin aussi bien à travers nos solutions comme Reflect IoD que sur notre accompagnement client en AMO pour lequel là-aussi les actions commerciales avec Autodesk sont un point fort.
Accroitre nos activités en France et dans le monde autour de l’intégration des nouvelles technologies du SI en s’appuyant sur le jumeau numérique. Je profite de cette question pour saluer le travail de Thomas PERPERE, qui nous a rejoint l’an dernier en tant que Busines Developer et fait un gros travail avec les équipes commerciales de Capgemini et d’Autodesk pour promouvoir des actions communes.
Comment votre collaboration avec Autodesk peut-elle vous aider ?
La synergie entre nos équipes commerciales et techniques doit se poursuivre et s’accentuer car elle nous permet de sécuriser les briques technologiques utilisées dans les solutions que nous proposons à nos clients. Il est impératif que nos roadmaps continuent d’être partagées sur le court moyen et long terme car c’est ainsi que l’on apporte de la valeur aux clients.
Capgemini est connu pour son impact sur les Grands Comptes. Reflect IoD et votre développement autour du BIM vous permettra-t-il d’atteindre d’autres typologies de clients ?
Parmi nos clients, nous avons des acteurs industriels à portée régionale. En soi, cela ne s’assimile pas à un grand compte et pourtant nous les accompagnons sur ce chemin C’est le cas notamment de mon second exemple indiqué précédemment. Il est vrai que les Grands Comptes sont la cible privilégiée des grands Groupes, mais Capgemini est un groupe qui permet aussi de travailler sur des sujets différents et des typologies de comptes différents. La meilleure preuve étant mon histoire ces dernières années. Dans le même niveau de comparaison, nous sommes partenaires de grands éditeurs mondiaux, pour autant j’ai pu mener des missions pour de grands comptes avec des startups comme Xinapps ou BlocInBloc, que je salue au passage pour leurs travaux et implications.
Connaissais-tu ABCD Blog ?
Qui ne connait pas ton travail et ton blog ? Tu me donnes là l’occasion d’intégrer le monde de tes lecteurs et c’est un très grand honneur pour moi de m’adresser à eux à travers ton blog. Ayant moi-même été revendeur Autodesk il y a plus de 20 ans et certifié sur ces technologies, j’ai appris auprès de cet écosystème beaucoup de mes connaissances actuelles même si j’ai pu m’en éloigner à d’autres moments. Ce partage est une vraie richesse, aussi je me permets de te remercier pour cela Emmanuel.
Quel message souhaiterais-tu passer à nos lecteurs ?
Quand je suis rentré chez Capgemini, je me suis demandé si j’y trouverai un écosystème qui me permette d’utiliser mes connaissances, d’en apprendre d’autres et de m’y épanouir. J’y ai trouvé des passionnés, des gens qui m’ont permis de progresser et m’ont encouragé à tracer de nouveaux sillons. Les histoires se font souvent sur la rencontre de personnes et je remercie ceux qui ont permis que cette histoire se concrétise.
Je n’oublie pas également nos clients, qui à l’époque où Capgemini se montrait un peu jeune sur ces sujets, nous ont fait confiance et avec lesquels j’entretiens encore aujourd’hui de très bonnes relations. Certains parmi eux sont des lecteurs de ce blog et je remercie cette communauté qui permet un tel foisonnement d’idées aujourd’hui. Nous vivons une époque incroyable, merci à vous et pour ceux qui le souhaitent retrouvons-nous à BIM World en octobre ou avant par téléphone.
Avec toute l’équipe Smart Digital Twin, nous serons heureux d’échanger avec vous.
Mickaël, un grand merci pour cette interview passionnante. Nous vous souhaitons un immense succès sur la route du BIM.
Site officiel de Reflect IoD ici.