Une fois n’est pas coutume, nous recevons cette semaine un acteur d’un domaine parallèle et complémentaire à celui du BIM. Et c’est avec grand plaisir que nous accueillons un grand industriel international, AGC et sa filiale GenieVision.
La démocratisation de l’accès au BIM, notamment pour les TPEs-PMEs est devenue indispensable si nous souhaitons que notre industrie effectue sa transformation digitale. Des acteurs nouveaux participant à cette métamorphose du secteur apparaissent et nous étonnent. C’est le cas de GenieVision, une filiale d’un Groupe Belge prestigieux (spin-off d’AGC Glass Europe) qui nous fait le plaisir de venir nous présenter leur solution. Nous recevons Caroline Zigrand, Co-fondatrice et COO de GenieVision qui va nous dévoiler leur stratégie et leur solution révolutionnaire.
Bonjour Caroline et bienvenue sur ABCD Blog. Pourriez-vous en quelques mots vous présenter à nos lectrices et lecteurs ?
Bonjour Emmanuel, et merci de m’accueillir. J’ai travaillé plus de 10 ans dans la mise en œuvre de nouveaux process et outils digitaux et innovants au sein d’AGC Glass Europe. En tant que co-fondatrice de GenieVision, j’utilise désormais toute mon expérience pour mener à bien ce projet : coordonner, anticiper, communiquer, répondre aux besoins des clients, minimiser les risques et les efforts pour optimiser les résultats et ce, afin d’offrir la meilleure solution possible à nos utilisateurs finaux. La construction est un monde nouveau pour moi. Amener l’innovation dans ce secteur est un véritable défi qu’il me plait de relever.
Beaucoup d’entre eux ne connaissent pas cette grande société qu’est AGC. Pourriez-vous nous la décrire en quelques mots svp ?
AGC Glass Europe produit, transforme et distribue du verre plat pour l’industrie de la construction (vitrage extérieur et décoration intérieure), l’industrie automobile (OEM et verre de remplacement) et divers autres secteurs (transport, énergie solaire et applications de haute technologie). C’est la filiale européenne d’AGC, premier producteur mondial de verre plat. Elle compte plus de 100 sites dans toute l’Europe, de l’Espagne à la Russie, et emploie environ 15 500 salariés.
Genie Vision est né de la volonté d’AGC. Pourriez-vous nous en expliquer la genèse et l’histoire ? Certains pourraient en effet être étonnés de ce passage d’industriels à développeurs logiciels. Et pourquoi le nom de GenieVision ?
GenieVision a émergé de l’AGC Start Up Bootcamp, un programme d’innovation lancé par AGC Glass Europe début 2018 pour promouvoir le développement d’idées nouvelles, radicalement différentes et encourager l’esprit d’entreprise.
Le processus était simple : amener chaque idée à maturité, proposer une valeur ajoutée et concevoir un business plan solide pour convaincre les investisseurs. GenieVision a relevé le défi et a obtenu le soutien d’AGC même.
Alors, il est vrai que GenieVision est un concept original et innovant qui n’a qu’un rapport lointain avec l’activité principale d’AGC, le verre. C’est une solution technologique destinée aux secteurs de la construction et de l’ingénierie. Elle permet d’afficher simplement et précisément une superposition 3D en Réalité Augmentée sur la réalité physique, grâce à un appareil mobile.
Le défi : amener le BIM sur chantier !
Il faut souligner que nous avions toutes les compétences nécessaires au sein de l’équipe fondatrice pour faire grandir et maturer ce projet. Hadrien, CTO, alors nouvelle recrue chez AGC, venait de l’industrie du jeu, avec une excellente connaissance de la RV/RA. Même chose pour Jean-Pierre, CDO, nouvellement arrivé avec comme bagage plus de 17 années d’expérience dans le développement de services de transformation de données géographiques dans le secteur de l’énergie et des services publics. Sans oublier la pugnacité de notre CEO, Philippe, avec plus de 20 ans d’expertise dans la transformation digitale et sans lequel nous ne serions probablement pas là aujourd’hui.
Comment êtes-vous organisés ? Et quels sont vos objectifs dans le secteur de l’AEC ?
Nous avons également veillé à peaufiner technologiquement notre USP, à savoir la capacité de caler un modèle 3D sur la réalité en 3 clics, de sauvegarder ce calage et de le mutualiser pour d’autres utilisateurs – process d’ailleurs breveté.
Notre objectif pour le secteur est d’offrir une interface visuelle et informative du modèle 3D en lien direct avec sa réalité, et ainsi constituer un support collaboratif pour tous les acteurs d’un projet.
La technologie GenieVision AR permet aux professionnels de la construction (AEC) de comparer la réalité sur site avec le BIM, de détecter des non-conformités et ainsi d’anticiper certains problèmes impactant l’exécution, son planning et inévitablement son budget. GenieVision ambitionne d’être l’interface visuelle des données 3D quelles qu’elles soient.
Pourriez-vous maintenant nous parler de vos solutions pour le terrain, mais aussi très utiles en phase conception ? Quel était le constat avant la naissance de GenieVision ? Quels cas d’usages GenieVision adresse-t-il ?
Dans notre approche commerciale, nous avons très rapidement compris que notre solution allait se confronter à 4 enjeux majeurs du secteur : l’adoption du BIM par la maîtrise d’ouvrage, la standardisation des process sur chantier, l’interopérabilité entre les systèmes existants et l’adoption de notre solution sur chantier.
En phase conception, notre solution peut aider à l’établissement ou à la validation d’un cahier des charges avec les sous-traitants, surtout pour des projets de rénovation.
Elle peut servir de support visuel pour aider les chefs d’équipe à expliquer un travail complexe à réaliser sur chantier.
En phase exécution
Les différents cas d’usages s’appuient essentiellement sur un travail de monitoring :
- Le monitoring des déviations entre as-built et as-planned : en un coup d’œil, je suis en mesure de vérifier si ce qui a été planifié comme opération est réalisé
- Le monitoring des déviations entre as-built et as-designed, un cas d’usage spécifique à la rénovation
- Permettre aux différents conducteurs de pouvoir détecter des déviations et/ou des non-conformités, et de s’inscrire dans un travail collaboratif avec les sous-traitants : on parle par exemple de la vérification des réservations pour la partie gros-œuvre ou de la pose des techniques spéciales…
On peut également intervenir dans la partie post-execution. Nous sommes prêts à mettre à disposition ce que nous appelons les BIM Data, ou la capacité pour un utilisateur à consulter via l’interface AR, les attributs d’un objet donné. Ceci nous ouvre tout un pan de cas d’usages encore inexploré.
Quelles sont les grandes qualités et points forts de GenieVision en quelques points ?
- La facilité d’alignement du modèle 3D sur sa réalité – en 3 clics seulement. Un process qui sera d’ailleurs breveté
- La capacité de sauvegarder cet alignement et de le rendre disponible à d’autres utilisateurs en 1 clic
- L’ergonomie de l’application – simple, facile et fiable
- La clé du succès réside également dans le processus de transformation des données du modèle 3D vers la RA. Grâce à des procédés innovants, nous nous dédouanons de la complexité et de la lourdeur du modèle
- L’architecture de la solution qui se veut ouverte et connectable à l’environnement de nos clients.
Cette belle technologie s’appuie beaucoup sur la RV et RA avec un degré de précision bluffant et une utilisation très facile. Pourriez-vous nous la décrire et nous indiquer le degré de précision ? Faut-il notamment un Wifi local pour la géolocalisation ?
Dans nos développements applicatifs, nous nous sommes fortement inspirés de ce qui ce fait dans l’industrie du jeu vidéo. Nous voulions une application aussi simple et agréable à manipuler surtout pour des gens de terrain ! Vous vous positionnez sur une « mini-map », plan 2D de votre étage, et le système vous affiche le modèle en RA à l’endroit où vous êtes localisé. Il vous invite ensuite à sélectionner dans le modèle et dans la réalité une même ligne (que cela soit une arête de mur ou de porte, etc.) et la magie opère. Le modèle est aligné de manière précise et vous voilà immergé dans votre maquette BIM !
Lorsque vous revenez plus tard sur site, vous pouvez réutiliser cet alignement. Il faudra alors effectivement être connecté. Mis à part ce procédé, toutes les autres fonctionnalités sont disponibles hors ligne.
Vous êtes Saas based, n’est-ce pas ? Aucune version desktop de votre solution ?
Nous hébergeons effectivement notre base de données sur un cloud sécurisé et hébergé à Francfort. C’est une question qu’on nous pose régulièrement, surtout de la part d’opérateurs de services publics, pour lesquels la sécurité est clé. Le développement d’une version desktop est réalisable mais cela n’est pas dans nos priorités actuelles.
Faut-il un casque de type Hololens ou un iPad suffit-il ? Si oui, de quel type ? Et les appareils Androïd sont-ils supportés ?
Actuellement, GenieVision est supporté uniquement sur IPhone ou IPad Pro.
C’est un parti pris mais nous avons fait le choix de profiter des technologies embarquées disponibles dans les dernière versions de ces appareils (IPhone 12 ou IPad pro) dont les caméras et le lidar.
Il est possible de travailler avec des versions iOS antérieures mais l’expérience sera moins bonne.
Vous êtes interfacés notamment avec Revit, l’un des logiciels BIM leaders du marché. Comment cela se passe-t-il ? Même si vous avez une interopérabilité openBIM / IFC, vous semblez être capables d’interpréter les données des modèles Revit en natif. Pourriez-vous nous en dire quelques mots ? Y-a-t-il un plugin direct pour Revit permettant de faciliter la vie des utilisateurs.rices ?
Notre priorité première était effectivement d’assurer cette interopérabilité openBIM, en étant capable de processer les fichiers IFC. Cependant, nous avons constaté que beaucoup de nos prospects travaillaient dans l’environnement Autodesk et optaient de plus en plus pour l’écosystème Autodesk Construction Cloud. Nous avons donc rapidement permis d’intégrer des fichiers au format RVT et très prochainement, il sera possible de se connecter directement avec BIM 360.
Quel est d’ailleurs un workflow typique Génie Vision ? Comment et en combien de temps la conversion on-line se fait-elle ? Y-a-t-il un process manuel de traitement des données chez vous ? *Comment gérer vous les aspects collaboration et reporting d’erreurs ? Un format ouvert de type BCF ? Ces informations sont-elles ensuite réintégrées dans les maquettes ?
Le workflow est assez simple. Dans un premier temps, il faut charger la maquette du projet sur Genie Gate, le portail GenieVision. Ce modèle est ensuite processé automatiquement et rendu disponible sur Genie App. Ce process a ceci de particulier qu’il permet un découpage automatique de vos projets en étages, sur base du fichier structure. Vous pouvez facilement les consulter au travers d’un viewer 3D et les modifier au besoin.
Dans Genie App, une fois le modèle aligné, comparez, vérifiez et reportez simplement en prenant des photos en les annotant et en les taguant. Tout ce que vous capturez sur site sera ensuite consultable au travers du portail via le viewer 3D ou via une liste que vous pouvez extraire au format BCF, Microsoft Word ou PDF.
Nous travaillons actuellement sur un reporting plus élaboré, mais nous restons résolument tournés vers une approche « intégrée ». Dans un premier temps, nous mettons l’emphase sur BIM 360.
Quel type d’informations y-a-t-il sur le hub auquel accède un utilisateur GenieVision et que peut-il y faire ?
Genie Gate joue ce rôle du hub au travers duquel le client peut administrer ses projets, gérer ses fichiers et accéder à la partie reporting.
Gérez-vous d’ailleurs toutes les disciplines ? Architecture, Structure et MEP ?
Toutes les disciplines peuvent être prises en compte. Soit vous gérez votre projet au travers d’un seul fichier. Cependant l’expérience sera limitée. Le mieux est de charger votre maquette en plusieurs fichiers – un fichier structure, un fichier MEP, un fichier Architecture, etc. – et chaque type de fichier constituera une couche/un calque dans l’application à utiliser pour filtrer ce que vous voulez voir.
Quelles sont vos cibles principales ? Les concepteurs maîtres d’œuvre (Architectes, ingénieurs, BET, etc.) ou les entreprises essentiellement ?
Aujourd’hui, nous adressons notre solution principalement aux entreprises générales et leurs sous-traitants. D’ici peu, nous pensons tester d’autres cas d’usages tournés vers l’industrie et la maintenance.
D’ailleurs, pensez-vous qu’une TPE de n’importe quel domaine (peinture, maçonnerie, charpente, climaticien, plombier, etc.) peut s’approprier votre solution ?
C’est possible… Mais il faut qu’il dispose d’une maquette BIM régulièrement mise à jour 😊… C’est là tout le défi.
Quels sont vos points différentiateurs par rapport à vos concurrents ?
Nous restons résolument focus sur notre produit principal – le viewer AR.
Nous avons mis énormément d’effort à rendre l’application, ses fonctionnalités et tous les process liés simples et fiables ! Et nous nous démarquons clairement grâce à cela.
Quels sont les premiers retours de vos clients ainsi que leurs demandes d’améliorations ?
Beaucoup de nos clients sont à la recherche de solutions innovantes qui leur apportent une réelle valeur ajoutée pour leur chantier. Grâce à GV, en un coup d’œil, ils ont une compréhension rapide et sans équivoque de leurs chantiers en rapport à la maquette BIM. C’est simple et collaboratif ! L’adoption sur chantier reste un point d’attention, ainsi que la qualité du modèle. C’est un travail de gestion du changement à faire ensemble avec le client et ses équipes.
Le client est également à la recherche d’un outil précis et stable. Nous ne remplaçons pas le géomètre, ni toutes les technologies de nuages de points. Mais nous leur offrons une belle alternative à l’exploitation du BIM sur chantier.
L’accès aux attributs du BIM est régulièrement demandé. Cela sera possible à partir d’octobre.
Enfin, le client veut quelque chose d’intégrable. C’est un point sur lequel nous travaillons actuellement, ensemble d’ailleurs avec Autodesk. Nous avons dernièrement intégré leur programme ADN.
Quel est le business model et le coût de votre belle solution ? Y-aura-t-il une version light pour les TPE ?
Nous proposons pour 99 €/Mois, une licence utilisateur/ multi projets. Cela reste modulable en fonction de l’usage et du nombre de licences demandées par le client. A partir de 3 licences, nous appliquons un prix dégressif et incluons dans l’offre des crédits « viewer » afin de faciliter la collaboration (par exemple avec les sous-traitants, ou d’autres parties impliquées dans le projet pour lesquels une version « viewer only » est suffisante.
Existe-t-il une version Education ?
Il y a une ébauche dans les cartons pour le moment. C’est une question de priorité, mais cela viendra.
Comptez-vous vous développer à l’international ?
C’est tout ce que nous pouvons espérer ! Actuellement, nous nous focalisons sur la France et le Benelux !
Quels sont vos objectifs de développements pour les mois et années à venir ?
Durant les mois à venir, nous travaillerons sur 3 points : l’intégration (priorité à Autodesk BIM 360), le reporting et l’exploitation des BIM data. Pour les développements à plus long terme, nous évoquions plus haut les cas d’usages industriels et maintenance. Cela nécessitera sans nul doute de nouveaux développements. Affaire à suivre !
Connaissiez-vous ABCD Blog et qu’en pensez-vous ?
ABCD Blog est une véritable source d’inspiration et d’information. C’est une tribune vers les nouvelles clés du secteur en France mais aussi à l’international. Merci à Emmanuel pour sa disponibilité, son expertise et ses bons conseils !
Souhaiteriez-vous d’ailleurs dire quelque chose de particulier à nos lectrices et lecteurs ?
Depuis le début de cette aventure, nous observons des changement progressifs et notoires du secteur en ce qui concerne la digitalisation du chantier ou du projet de manière plus globale. Les discours changent. Nous constatons que le secteur adopte un discours plus ouvert en exprimant la nécessité d’optimiser l’usage du BIM dans toutes ses dimensions et ce, non plus uniquement pour la durée de vie du projet mais également du bâti lui-même. Pour y arriver, le premier objectif semble consister à la centralisation et la standardisation des process autour de sa gestion. Des outils comme GenieVision peuvent clairement aider !
Caroline, un grand merci pour cette belle présentation et un grand bravo pour cette solution qui va c’est certain aider à développer le BIM sur le chantier ! Nous vous souhaitons un franc succès.
C’est un travail d’équipe ! Je leurs transmets ! 😊
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